Les femmes s'en mêlent – Rose Kemp, Plasticines, Juliette and the Licks – Bataclan – 23 avril 2007
Je n’avais pas flairé l’arnaque. J’ai réalisé trop tard que les petits malins n’arrivaient qu’à huit heures, soit pour le show des Plastiscines (et après celui de Rose Kemp).
Alors que j’écoute la dite-Rose Kemp massacrer « Amazing Grace » - qui n’est pas en soi une grande mélodie, je vous l’accorde, mais qui pourrait passer pour un chef-d’œuvre à côté de ses compos originales -, une réflexion me vient à l’esprit, qui tient beaucoup du réflexe humanitaire : Que n’explique-t-on à tous ces gens qu’ils ne sont pas obligés de faire « musiciens » pour gagner leur vie ? On manque de bras dans le BTP, par exemple...
Après s’être longuement baladées dans le Bataclan - étonnamment détendues, à quelques minutes d’affronter le public d’une salle tout de même un petit peu légendaire -, les Plastiscines montent sur scène et font, d’entrer de jeu, péter les Gibson.
Je n’ai vu ni les Gogos ni les Bangles, mais j’imagine que, sur scène, ce devait être un peu comme ce soir.
Les Plastiscines ont déjà ce talent d’entrer, dès le premier morceau, dans le vif du sujet. Pas le temps de se demander si l’on aime ou si l’on n’aime pas. Elles sont là, devant vous, et ne vous laissent pas le choix.
Elles sonnent peut-être mieux qu’aucun girls group américain des années 80 n’a jamais sonné en live. À tel point que, quelques minutes après le début du concert, je surprends deux vieux rockers en train d’acheter des badges Plastiscines qu’ils agrafent direct au revers de leurs vestes. (Je conseille vivement celui avec le « P », à 1,50 €, complètement pop art.)
On peut associer plein de mots aux Plastiscines : couleur, fun, pêche, humour, malines, légèreté, adrénaline, ludiques… Je ne lance pas un concours, là, c’est juste pour vous donner une idée de ce qui vous attend quand vous irez les voir.
Parmi leurs compos les plus funs, j’aime beaucoup ce « (Zazie fait de la) Bicyclette », un petit refrain, façon kaléidoscope psychédélique, que j’ai fredonné tout du long, en rentrant chez moi (à bicyclette, évidemment).
« Bicyclette » est chantée par Marine, mais parlons aussi de la voix de Katty. Elle est chaude, rappelant une certaine Debbie Harry, voire même, une Patti Smith - lorsqu’elle va chercher des notes graves au fond de sa gorge.
Je crois que mon morceau préféré est tout de même « Loser », pour sa mélodie, et puis aussi parce que ça fait du bien de penser que les filles s’intéressent parfois aux losers.
Quant à « La règle du jeu » - dont le thème me fait penser à ce film de René Clément sur la jeunesse de St Germain des Prés des années 50 -, celui-ci pourrait bien devenir l’hymne de la nouvelle génération rock’n’roll parisienne.
Hey, Louise et Caroline !… Je ne vous oublie pas, c’est juste qu’on ne parle jamais assez des sections rythmiques (moi le premier). Mais c’est bon signe : c’est quand elles n’assurent pas qu’on en parle.
Hélas, tout a une fin et la vie n’est pas faite que de bulles de savon et d’éclats de rire. Il reste encore à voir Juliette and the Licks… Encore une victime de la mauvaise orientation professionnelle : Juliette Lewis cartonnait au cinéma (oscars et tout le bazar…) quand elle décida de tout laisser tomber pour se consacrer à la (gulp !) musique. Voyons, Juliette ! pour faire de la musique, il faut un peu de talent.
Observons tout de même ce que ça donne…
Je soupçonne les Licks d’avoir acheté le DVD « Apprenez le heavy metal en dix leçons », la semaine dernière, et de n’avoir pas encore eu le temps de dépasser le premier chapitre : « Comment lancer sa guitare au-dessus de sa tête sans s’éclater le pif ? »
Il y a un autre DVD que les Licks ont dû acheter - celui-là, je pense qu’ils en ont visionné tous les chapitres plusieurs fois -, c’est : « Comment se faire des bras de camionneurs, d’après la célèbre méthode du professeur Schwarzenegger ».
Mais tout ça (les lancers de guitare, les chanteuses moulées dans des pantalons de vinyle noir), ne suffit pas à faire un bon concert. C’est ce qu’ont l’air de penser tous ces gens qui s’ennuient autour de moi, et en sont réduits à noyer leur désarroi dans des flots de bière. Pour être honnête, il y avait aussi des fans devant la scène.
Je suis toutefois reparti sur mon bike de fort bonne humeur, car les Plastiscines avaient sauvé la soirée.
Pierre Mikaïloff
A regarder